14 mai, 2017



Les (Toutes) Petites Routes du Vexin

 
Aujourd'hui, une petite balade avec la XT, mais pas question de brusquer la mécanique, alors bien entendu pas de route en "A" ou en "E", pas plus de "N", tout au plus quelques "D" et surtout des "C".

C'est quoi les "C" ? Selon le Code de la Voirie routière, il s'agit des voies qui font partie du domaine public routier communal, autrement dit les routes qui se limitent au territoire d'une commune, éventuellement à la liaison entre deux communes limitrophes.

Autant dire qu'on est loin des grands axes routiers Européens caractérisés pour la plupart par un mur ininterrompu de camions sur la file de droite, qui ne laisse entrevoir le paysage que pour admirer les zones industrielles ou les plates-formes logistiques.

Non, là on est sur des bandes de bitumes qui datent à peu près de l'invention du Macadam, qu'on n’ose pas affubler d'une bande blanche de signalisation au sol, d'abord parce que la peinture masquerait une bonne largeur de la voie, et puis parce qu'il n'est pas utile d'interdire le dépassement alors que la largeur est à peine suffisante pour laisser passer une seule voiture.

En outre, ce qui ne vous aura pas échappé, ces routes sont soumises à l'article L141-9 de la Loi 89-413 1989-06-22 du 24 juin 1989, autant dire que le bitume précité présente la plupart du temps tous les symptômes de la desquamation, voire de l'épidermolyse bulleuse, parfois même du syndrome de Parry-Romberg, sans parler de l'hypertrichose qui se manifeste par de l'herbe qui pousse au milieu de la chaussée, comme quoi la nature reprend toujours ses droits.

Je sais, c'est pas beau à voir, mais sur une route ce n'est pas trop grave, on est là pour regarder le paysage, alors tant pis pour les déformations intempestives et les amas de gravillons en sortie de virage, je vous l'avais bien dit de ne pas prendre une hypersport de 200 CV pour aller sur mon terrain de jeu.

Non, là les 30 canassons de presque 40 ans d'âge du gros mono sont amplement suffisants, et même en 125 ça fera une jolie promenade.

Le but du jeu est donc de tourner autour du Vexin en empruntant les plus petites routes possible, prémisse pas plus idiote que celle de prendre l'A5 pour faire la course avec le TGV, avec une conclusion moins aléatoire.

Voilà mon trajet, à vous de l'agrémenter, d'autant qu'il recoupe un peu de l'itinéraire des Châteaux du Vexin



Départ de l'Isle-Adam, charmante cité balnéaire dont j'ai déjà cité le système féodal, on verra plus loin que ce n'est pas la seule bourgade du Val d'Oise à s'enorgueillir d'une telle oligarchie.

On passe ensuite de petites vallées à des espaces plus dégagés et agricolo-intensifs, mais le patchwork vert et jaune des champs de blé ou de colza de ce milieu de printemps fait un paysage plutôt sympathique, même si le parfum... délicat du colza peut rebuter un peu les fosses nasales des habitués des particules fines parisiennes.

A propos de plaisir des sens, outre l'olfaction, la vue sera encore plus comblée si cette balade, assez courte (2 à 3 heures selon les pauses-pipi et pauses-photo), est faite le matin ou en fin d'après-midi pour bénéficier d'une belle lumière.

Outre les beautés de Dame Nature, on rencontre quelques petits villages nichés au creux de vallons ou à l'abri des bois et forêts, avec leurs vieilles pierres admirablement mises en valeur qui ont beaucoup de charme. D'accord, on n'est pas pour autant dans la "France Profonde", ça ne respire pas la pauvreté mais pour une fois que l'abondance de moyens ne se traduit pas par des fautes de goût on ne va pas s'en plaindre.

A noter le passage par Theuville, certainement le plus petit village et peut-être le plus grand lieu mythique du département, presque village-fantôme autour duquel la légende de "La Duchesse" va bon train.

Je n'ai pas pu vérifier les informations, la plupart des sites web reprenant peu ou prou le même texte, je vous engage donc à vérifier par vous-même.

L'un de ces sites présente l'avantage d'afficher quelques belles photos, dont une que j'ai honteusement volée pour illustrer cet article.



Retour à l'Isle-Adam, vous pouvez remettre les valises sur la GS 1200 sans risquer de les érafler de chaque côté de la route.

Si vous faites cette balade le matin, voici une bonne adresse, sur le retour, pour le repas du midi :

06 mai, 2017



Lacs et Cols - 1er épisode
Suisse, Italie

Bon ça y est, la moto est chargée, où on va ?

OK, on passe voir un copain à Genève, pour la suite on improvisera.

C'est pareil à chaque fois, le but du voyage n'est jamais clairement défini, tout au plus une vague idée de la direction à prendre, l'important c'est d'être en vacances, de préférence sur une moto, le reste on verra bien.

Comme le dit le proverbe chinois "Le vrai voyageur ne sait pas où il va" (à moins qu'il ne s'agisse d'un extrait d'un dialogue d'Audiard?)

Un bout d'A5, parce qu'il faut bien se sortir du bazar iledefrançais et qu'il n'y a jamais personne sur cette autoroute, et puis on commence à se promener en Bourgogne puis dans le Jura.

On passe quelques moments au bord du Lac des Rousses et du lac de Joux, histoire de supporter la température caniculaire de ces derniers jours et on redescend dans l'enfer surchauffé de la métropole Suisse : L’Helvétie n'est déjà pas le pays où je me sens le mieux, mais avec 40 degrés c'est encore moins supportable... C'est décidé, ces vacances seront dédiées à la recherche de la fraîcheur au bord des lacs et en haut de montagnes.

Pour nous suivre dans notre quête:

On s'enfuit de Genève la torride, en suivant le Léman sur sa rive méridionale et on remonte le Grand Saint-Bernard, en longeant le Lac des Toules, ça fait déjà quatre lacs au compteur.

Passé le col, on est Italie, ça va tout de suite mieux, c'est vrai l'air paraît plus léger !

L’Italie, tout le monde connaît, pas la peine de vous raconter la bonne bouffe et les gens rigolards : Selon Cocteau "Un Français est un Italien de mauvaise humeur", donc un Italien est un Français souriant.

En plus, (du moins en Italie du Nord) une part relativement importante de la population comprend le Français, et une part à peine plus réduite le parle. C'est bien simple, on se croirait en Belgique, avec le soleil en plus.

Et les montagnes.

Et les pâtes à la tomate.

Et les Flamands en moins (non, je rigole, ils sont sympas aussi, c'est juste qu'on les comprend moins quand ils parlent).

Pour les côtés pratiques, en Italie l'essence est un peu plus chère, on trouve des hôtels aux alentours de 5o Euros assez facilement, les restaurants sont très abordables et le pain n'est pas fameux, mais c'est une question de goût, faut dire que je suis assez difficile sur ce plan-là.

Depuis mes premières balades transalpines (voir les Cinq Terres), on commence à voir de plus en plus de radars automatiques, plus ou moins signalés. La méfiance est donc de rigueur, d'autant que le concept de libre circulation des personnes et des biens dans l'espace Européens commence à concerner aussi les contraventions...

Cependant, les routes que j'emprunte sont plus propices à la flânerie qu'au raclage de repose-pieds.

Sauf dans certains cols, mais là vous allez vous faire tourner autour par les locaux, à moins de vous entraîner toute la semaine et de les attendre le dimanche matin : C'est pas dur, dès que vous voyez une horde de Multistrada, de GS1200 (sans les valises!) et de KTM Adventure, c'est eux, ne vous contentez pas de les suivre, passez devant eux sinon c'est vous que les Carabinieri vont choper en haut de la montée.

Bon, de toutes façons, avec la TDM, nous deux et nos bagages, on est loin de pouvoir jouer à ce petit jeu, et on ne répond même pas à la provocation, mais on fait gaffe quand même, pas la peine d'exploser le budget.

Bon, vous l'avez compris, j'aime bien l'Italie, alors on continue.

Depuis Aoste, on suit la vallée, les pressés prendront l'autoroute, et puis on passe à travers les derniers contreforts des Alpes, avec au loin vers le sud la plaine du Pô. On longe le lac d'Orta, puis pause au bord du lac de Mergozzo, sixième de la liste.

Au bord de ce petit lac loin des routes touristiques, je trouve un superbe hôtel au bord du lac, plage privée, décor fin 19ème siècle, garage pour la moto... et prix raisonnable !

Le village est à deux pas et il sent bon la douceur de vivre, avec ses petites ruelles fraîches, son petit port et les gosses qui jouent sur la place.

Ce sont des endroits comme ça où on se dit qu'il ferait bon y poser ses valises le jour venu...


La route de la Dolce Vita :

Mais le jour n'est pas venu (viendra-t-il ?), et la route nous emmène ensuite au lac Majeur jusqu'à Lugano. Là on commence à voir des demeures magnifiques, les lacs italiens sont depuis des siècles les lieux de villégiature des nantis des grandes villes du Nord. Par contre, difficile d'approcher l'eau, les plages sont réservées.

Le paysage est magnifique avec les montagnes qui encerclent le lac, comme pour la plupart des lacs du Nord de l'Italie. Dans ces régions assez fréquentées, il faut quand même regarder AUSSI la route : La circulation est parfois "Italienne", mais je trouve les autochtones à 4 roues beaucoup moins agressifs que leurs homologues helvètes : l'Italien donne parfois l'impression de faire n'importe quoi, mais en général il est beaucoup plus attentif à ce qui se passe sur sa trajectoire que les autres Européens.

Ceci dit, une fois qu'il a jugé qu'il pouvait passer, il DOIT passer, on est dans un pays latin, ne l'oublions pas. Donc, inutile de faire des appels de phare ou des coups de klaxon (à chaque fois, j'ai reçu un salut hilare, l'avertisseur étant destiné à dire bonjour à quelqu'un de sa connaissance), on se pousse un peu et ça passe.

La route serpente le long du lac, et puis on traverse les collines vers le lac de Lugano, repos à Ponte Tresa, dans une petite pension de famille au décor incroyablement kitsch, tenu par deux mamies incroyablement âgées mais incroyablement gentilles.

Huitième lac au compteur, mais pas de bain de minuit, les moustiques sont trop agressifs.

On est là :

(La suite dans un prochain article, soyez patients !)







22 avril, 2017


La Maison Ronde

Dimanche dernier, week-end des 24H du Mans moto.

Je n'ai pas un intérêt particulier pour la compétition, bien qu'ayant été en contact quelques années auparavant avec l'une des écuries habituellement présentes dans ces épreuves, avec une anecdote assez amusante qui me revient ; Un soir au cours du repas, alors que je discutais avec deux des pilotes de mon goût pour les voyages en moto, l'un d'eux me dit :

" Ca a l'air sympa, il faudrait que je passe mon permis moto un de ces jours "

Ce à quoi le second a répondu :

" T'es fou, c'est bien trop dangereux !"

Bref, j'étais donc en train de bricoler tranquillement lorsque la radio diffuse son flash d'informations de 11 heures ; Après la litanie des nouvelles relatives à la période électorale en cours, puis l'énoncé du résultat de tous les matches de ballon rond de la 1ère à la 25ème division, je me mets quand même à tendre un peu plus l'oreille car le "Journaliste" annonce que la radio qui lui paye son salaire va diffuser l'arrivée des 24 Heures du Mans moto, je cite "A 15 heures cet après-midi car la course dure 24 heures et est partie hier samedi à 15 heures"

Fin du flash, on passe à autre chose.

Bien entendu, un esprit chagrin aurait pu regretter que cette intervention n'ait pas été ponctuée de quelques mots sur la situation en cours, voire même une petite notion du classement provisoire des 3 machines en tête de course, mais on ne peut quand même pas reprocher à un "journaliste", doué d'un tel goût pour les mathématiques et si soucieux de donner des notions précises de temporalité à son auditoire, de faire en plus de "L'Information".

Bon d'accord, ce n'est que les 24H du Mans Moto, tout le monde s'en fout, et moi le premier.

Reste que ce petit détail n'est malheureusement pas le seul qu'on puisse entendre, du moins, s'il m'a sauté aux yeux (aux oreilles) parce qu'il s'agissait d'un domaine qui présente pour moi un peu d'intérêt, je pense et je crains qu'il en soit de même pour d'autres domaines dans lesquels on s'attend à une information pas trop subjective car notre niveau de connaissance ou de compréhension ne nous permet pas de juger de la validité de ce qu'énonce le "journaliste" dans son micro.

Attention, il ne s'agit pas de tomber non plus dans le travers de la théorie du complot, mais on ne peut s'empêcher de penser que, au vu (à l'ouïe) du peu de rigueur de ceux qui la diffusent, une information livrée sur le vif, sans recul, que ce soit sur le degré de pollution, la situation économique ou tout autre sujet un peu sensible pour la race humaine en général et la société en particulier, si elle fait bondir et hurler d'indignation le professionnel de la profession (comme disait Jean-Luc Godard), n'éveillera aucune objection de la part du commun des mortels.

Vous, je ne sais pas, moi j'essaye de ne pas m'en tenir à une seule source d'information et de demander leur pédigrée aux couleuvres qu'on essaye de me faire avaler. Comme tout n'est pas mauvais dans les productions de la Maison Ronde, écoutez "le Vrai du Faux" sur France Info le matin vers 8h20, pas forcément pour les sujets abordés mais pour appréhender un peu mieux la façon dont certaines informations sujettes à caution sont diffusées et relayées, en particulier grâce à ce merveilleux et terrifiant média qu'est Internet.

Ceci dit, c'est mon écurie qui a gagné les 24 Heures cette année, ça c'est un fait vérifiable et avéré, mais je ne sais toujours pas si David a passé son permis...


22 janvier, 2017

Hommage

J'avais décidé de ne plus me miner le moral et de ne plus faire de rubriques nécrologiques dans ce blog, mais l'année passée a été trop lourde pour ne pas consacrer quelques lignes d'hommage à ceux qui m'ont quitté, ça me fait du bien, peut-être que ça peut aussi aider ceux qui se battent contre la connerie et les autres maladies mortelles.

En vrac, je citerai donc David Bowie, Gégé (Gérard Anthony), les spectateurs du feu d'artifice de Nice, ma frangine, Prince, Cheval (Alain Chevallier), Marcel Gotlib, Claude Lambert et puis je vais m'arrêter là, ça devient morose...

Vous avez tous eu de l'importance dans ma vie, je pense à vous, et dans ce blog je vais continuer à parler de moto, parce que c'était la passion de quelques-uns d'entre vous, et de balades et de voyages en espérant que ce ne seront pas les derniers pour ceux qui restent.

21 janvier, 2017


Mes motos (3)  - BMWR90S

( si vous avez loupé le début, allez lire l'épisode 1 et l'épisode 2 )

Quand j'étais petit (ou plutôt "plus jeune", car je disposais déjà d'un gabarit considérable), je découpais les photos de motos dans tous les journaux qui me tombaient sous la main, ce qui était facile car le deux-roues à moteur était passé du statut de monstre pétaradant semant la terreur dans toute la région au phénomène de mode grandissant et donc médiatisé, et Marlon Brando roulant à tombeau ouvert sur sa T6 accompagné de son équipée sauvage avait été remplacé dans l'esprit du français moyen par Brigitte Bardot, cheveux au vent sur une AT125 avec sa bande de copains sur les routes de Saint-Tropez.

A l'époque mes parents lisaient chaque jour un quotidien (ben oui) dont le nom évoquait l'habitant de la capitale d'un pays européen de langue française, même que ces années-là un qualificatif lui était adjoint, évoquant ce qui lui était arrivé le 25 Août 1944. Le journal existe toujours, sans le qualificatif et, de populaire, est devenu populiste...

L'un des rédacteurs devait être féru de motocyclisme, car il ne se passait pas une semaine sans que j'exerce mes talents de découpage, récupérant avec passion des photos dont la résolution typographique de 40X40 pixels me permettait quand même de rêver, comme quoi l'imagination peut suppléer à tout.

C'est ainsi qu'un beau jour de 1973, l'organe de presse pré-cité a affiché sur une demi-page une photo qui m'a mis sur le c.. et qui m'a fait dire "Quand je serai grand, j'en aurai une"

Le journal annonçait la présentation au salon de Paris de la BMW R90S.

(J'ai conservé la photo de l'époque, voir en tête de cet article !)

Durant des années, ce souvenir ne m'a pas quitté, jusqu'au jour où on m'a proposé une "Silver Smoke" de 1975 dans son jus, en échange d'un prix modique et de la promesse de continuer à donner de ses nouvelles à son ancien propriétaire.

Bien que, en 1973, cette moto voulait se donner une image "Hyper-Sport", le fait de monter deux carburateurs Dell'Orto en lieu et place des Bing n'avait quand même pas donné les ailes de Pégase au percheron Bavarois. Cependant, les 900cc assuraient un couple respectable qui, associé au poids raisonnable et au châssis rigoureux, permettait d'atteindre des vitesses honorables et de les tenir presque indéfiniment. On était plutôt derrière les bicylindres Italiens ou Anglais, mais dès que le trajet dépassait les 200 kilomètres, on était à peu près certain d'arriver à bon port.

C'était malheureusement la fin des usines britanniques et leurs produits souffraient d'une piètre qualité, due surtout à un désintérêt des constructeurs, et les nombreuses marques italiennes s'accordaient toutes pour n'offrir qu'un minimum de rigueur de fabrication. Les Japonais dominaient le lot question fiabilité et proposaient des produits attractifs et valorisants, et seule en Europe l'industrie germanique résistait aux puissantes firmes de l'empire du soleil levant.

La BMW en général, et la R90S en particulier, représentait donc en ces périodes de Giscardisme la seule alternative non japonaise pour les "Roule-Toujours" et à ce titre elle figurait à la place d'honneur dans mon Panthéon motocycliste.

Je n'ai pas été déçu, loin de là, car la machine a répondu à mes attentes. Moi aussi j'avais trouvé ma voie, fi du gros mono, le twin pour voyager c'était quand même autre chose.

Comme je l'ai dit, la machine était dans son jus, mais l'un des précédents propriétaires avait eu des velléités compétitives et avait demandé quelques aménagements à Claude Lambert, grand monsieur "sorcier" du side-car en général et des BM en particulier, qui sévissait dans le midi et faisait le bonheur des amateurs de course de côte en mal de performances (Pour en savoir plus, lisez donc cet article sur ce drôle de bonhomme )
 
La moto avait donc subi la greffe d'un cadre de R100-7, lui-même amélioré par le remplacement de la boucle arrière boulonnée par une vraie boucle en vrai tube costaud, soudée sur le cadre. Cette petite chirurgie s'est avérée très utile, que ce soit pour la rigueur de la tenue de route à des vitesses inavouables que pour assurer la solidité de l'ensemble une fois la moto chargée avec conducteur, passagère, armes et bagages. Avantage de l'opération, l'arbre de transmission a bénéficié d'un amortisseur, nouveauté des motos de la "Série 7" et qui a limité fortement les à-coups au passage des vitesses en attendant que je m'habitue à l'embrayage monodisque.

Autre greffe improbable, une fourche de Ducati trônait à l'avant, munie de freins Brembo largement plus efficaces que les ATE, mais là il y a eu rejet, l'aspect historique l'a emporté sur l'efficacité et j'ai remis la fourche d'origine. Tant pis pour le freinage, mais tant mieux pour la beauté de la chose.


La machine n'avait pas besoin de beaucoup d'accessoires pour être prête à sillonner les routes d'Europe : Deux valises, une sacoche de réservoir et zou, c'est parti, à la rigueur une paire de manchons pour l'hiver ; Pas besoin de plus d'équipement, à l'époque ma vue était assez bonne pour lire les cartes tout en roulant (de toute façon, en ces années de Miterrandisme déclinant, le GPS était réservé à l'armée étazunienne).

Le confort était excellent, la position de conduite parfaite et les kilomètres pouvaient défiler sans fatigue.Le moteur se contentait d'un peu (au début...) de super, bien que plombé, et d'une quantité d'huile non négligeable mais disponible dans n'importe quelle boutique du coin de la rue, puisque la boîte séparée et l'embrayage à sec permettaient de remplir le carter moteur avec autre chose que de l'huile spéciale moto.

Pour bien faire les choses, une vidange moteur tous les 5000 km et un remplacement des toutes les huiles  (moteur, boîte, cardan) et filtres tous les 10000 m'ont permis de conserver un moteur en bonne forme, et c'est une procédure que j'applique à toutes mes machines, la tranquillité vaut bien quelques litres d'huile.

Au chapitre bricolage, l'entretien courant se limitait à peu de choses, mais les plus grosses interventions (embrayage, joints de boîte, etc.) nécessitaient quelques outils spéciaux à faire perruquer par le tourneur-fraiseur du bout de la rue en échange d'une bonne bouteille, car on trouvait encore des officines qui travaillaient à l'ancienne, avec des machines datant du début de la révolution industrielle, sans les normes qui imposent maintenant à l'ouvrier de se tenir à plus de 25 mètres du moindre outil coupant, commandant toute opération via un ordinateur.

Maintenant, il faut faire sauter 12 sécurités pour accéder à la pièce en cours d'élaboration afin de pouvoir contrôler une cote, et pour refaire vite fait une passe d'un demi-millimètre il faut reprogrammer toute la machine, autant dire que pour faire tourner la plus simple des entretoises il faut prévoir un budget équivalent au PIB du Burkina Faso... Bon, passons et continuons sur les bricoleries effectuées sur cette moto.


Avec le temps, les carburateurs italiens cités plus haut présentaient quand même quelques défauts : Outre les pompes de reprise qui n'offraient qu'un léger surcroit d'accélération, peu sensible en raison de la surcharge pondérale du pilote, en échange de nombreux litres de combustible, l'usure des boisseaux et de la butée rendaient le réglage du ralenti et la synchronisation difficiles, impliquant là aussi une augmentation non négligeable des besoins en carburant. La suppression des pompes a permis d'améliorer un peu la situation au détriment d'une insignifiante perte de caractère, mais il a quand même fallu procéder au remplacement des carburateurs vers les 120000 Km. Pas de bol, les Dell'Orto de 38 étaient spécifiques à la BMW, donc un peu difficiles à trouver mais bien moins onéreux que les Bing.

Autre amélioration notable, un allumage électronique a remplacé les rupteurs au réglage délicat, assurant là aussi une meilleure régularité de fonctionnement.

Les années nonante touchant à leur fin, il a bien fallu abandonner le plomb dans l'essence, car on vivait une époque d'alchimistes qui transformaient ce vil métal en or pur, certains en imposant des taxes faramineuses face au super non plombé, d'autres en proposant des additifs à rajouter à chaque plein, et enfin quelques-uns en remplaçant les sièges et les soupapes pour des pièces adaptées aux exigences écologiques.

C'est cette dernière solution que j'ai fini par adopter, et bien m'en a pris car le moteur, fatigué par plus de cent mille kilomètres de bons et loyaux services, en a profité pour reprendre un petit coup de jeune. Et c'est reparti pour 60 000 Km, à partir desquels j'ai décidé d'accorder au flat-twin un retraite bien méritée, réservant son usage à la balade nostalgique du dimanche.

En résumé, la 90S méritait (et mérite toujours) l'auréole dont elle était parée, rompant l'image austère de "Moto de flic" du bicylindre teuton tout en gardant un côté "roule-toujours". Même si sa cote auprès des collectionneurs égale celle des tableaux de Van Gogh, elle ne mérite pas de rester dans un musée !

Si vous cherchez à en acheter une, envoyez-moi un mail pour avoir quelques conseils...

baladadeuxroues@gmail.com